À l’approche de la rentrée académique 2024-2025 en République Démocratique du Congo (RDC), le secteur de l’enseignement supérieur et universitaire fait face à une situation particulièrement tendue. Lors du Conseil des ministres du vendredi 25 octobre 2024, Marie-Thérèse Sombo, ministre de l’Enseignement Supérieur et Universitaire (ESU), a alerté sur l’urgence d’une intervention gouvernementale pour éviter que cette rentrée, prévue pour le lundi 28 octobre, ne soit sérieusement perturbée.
Les revendications des enseignants s’accumulent depuis plusieurs mois sans réponse concrète, malgré les promesses du gouvernement. Parmi les doléances principales figurent :
– Arriérés de salaires : De nombreux enseignants n’ont toujours pas reçu leurs salaires, une situation qui impacte directement leur moral et leur pouvoir d’achat.
– Primes de recherche : La stagnation des primes allouées à la recherche décourage les personnels académiques et scientifiques, qui peinent déjà à financer leurs travaux dans un contexte de crise économique.
– Distribution incomplète des véhicules : Annoncés en 2023, les véhicules promis aux professeurs n’ont toujours pas été intégralement livrés, renforçant la frustration au sein du corps enseignant.
Ces revendications font écho aux engagements pris lors de la commission paritaire tenue à Bibwa en septembre dernier. Les représentants syndicaux, soutenus par leurs bases, rappellent que ces engagements étaient censés répondre aux besoins essentiels des enseignants pour un environnement académique plus serein et productif.
Marie-Thérèse Sombo a présenté un tableau sombre de la situation, insistant sur le besoin urgent de mesures concrètes pour garantir une rentrée « apaisée ». Elle a également soulevé d’autres défis, dont la mécanisation des nouveaux docteurs à thèse et la création d’un comité de suivi des accords de Bibwa, visant à mieux encadrer et surveiller les engagements de l’État envers les enseignants.
« Le système éducatif supérieur est à un point critique, fragilisé par la baisse du pouvoir d’achat et les promesses non réalisées. Une action immédiate est indispensable », a déclaré la ministre. Elle a, par ailleurs, insisté sur la nécessité de revoir le système Licence-Master-Doctorat (LMD), dont les premiers bilans montrent des faiblesses structurelles, principalement dues à un manque de ressources pour son implémentation adéquate.
En parallèle, le ministère de l’ESU s’efforce de renforcer le contrôle de gestion dans les établissements publics. Des missions d’inspection sont actuellement en cours, et une nouvelle instruction académique, la n°026, est en préparation pour encadrer les modalités de paiement et d’utilisation des frais académiques. Ce texte vise également à préciser les règles de fonctionnement des universités et instituts supérieurs afin de lutter contre les dérives financières et améliorer la transparence.
Malgré ces initiatives, le spectre de la grève plane sur la rentrée académique. Les syndicats d’enseignants, dont l’Intersyndicale des Professeurs de l’Enseignement Supérieur (IPES), avertissent que si aucune avancée n’est constatée, des mouvements de protestation pourraient éclater dès le début des cours, menaçant de paralyser le calendrier académique.
« Les enseignants sont fatigués des promesses sans suite. Nous réclamons des actions concrètes et immédiates, sinon nous n’aurons d’autre choix que de recourir à des mesures plus radicales », déclare un représentant de l’IPES, laissant entendre que des grèves et autres actions de protestation sont envisageables.
Pour le gouvernement, l’enjeu est double : garantir un enseignement supérieur de qualité et apaiser les tensions sociales. Sous la pression croissante des syndicats et des enseignants, l’exécutif est désormais au pied du mur. Des réponses immédiates sont nécessaires pour éviter une année académique marquée par les grèves et les retards, qui pourraient encore fragiliser le système éducatif supérieur déjà vulnérable.
La rentrée 2024-2025 en RDC s’annonce donc sous haute tension. Les jours à venir seront déterminants pour savoir si le gouvernement saura apaiser les inquiétudes des enseignants ou si une mobilisation générale des acteurs académiques marquera le début d’une nouvelle crise dans le secteur de l’enseignement supérieur.
Munguiko Masudi Olivier